Dans ma jeunesse, j'ai beaucoup fait de vélo. Certes j'ai commencé tard (à 11ans) mais entre 1962 et 1969 j'en ai sillonné des routes ! De la Bretagne à la Haute-Vienne en passant par le Vaucluse, la Saône et Loire, le Rhône, la Charente, la Drôme....
C'est donc en 1962 que j'ai commencé. C'était à Lorient, alors que ma mère était partie à Quimper avec ses deux soeurs et mon cousin Jean-Yves, sans moi donc. Alors de rage, je décidai d'apprendre à monter à vélo. C'est sur celui de Jean-Yves, un petit adapté à sa taille mais sans roulettes que j'arpentai le trottoir (en tout bien tout honneur !)
Au début une gamelle tous les dix mètres. Puis tous les 20. Et le soir, quand ma mère revint de Cornouaille, elle vit son fils couvert de plaies et de bosses.
Mais qui savait monter à vélo.
C'est en 1965 que mes parents m'offrirent un vélo tout neuf, promis si je passais mon BEPC. C'était un mi-course 3 vitesses de couleur verte. Avec lui plus aucun des environs de Valréas (84) ne m'était désormais inconnu. De Montélimar à Orange en passant par Nyons et Pierrelatte, sous un cagnard sans pitié, je roulais....
J'étais si présomptueux que j'entrepris de grimper le Mont Ventoux !!! Au bout de quinze kilomètres oscillant entre 8 et 15 %, j'ai vite jeté l'éponge.... N'était pas Anquetil ou Poulidor qui voulait.
Entretemps, Jean-Yves roulait lui aussi sur un meilleur matériel qu'auparavant, le même que moi, un demi-course muni lui aussi de 3 vitesses.
Et durant les vacances qui suivirent, ce fut notre passe-temps favori. Nous avons sillonné pas mal de routes de la région Lorientaise avec nos biclous, et Jean-Yves avait même imaginé d'aller un jour jusqu'à Limoges !!! Par étapes mais quand même !!! Nous n'avions que 12 et 15 ans !
Notre "must"était de faire des courses. Contre la montre, bien entendu, il n'était pas question de nous mettre en danger. Et là je dois dire que les duels étaient acharnés. On faisait à peu près les mêmes temps, et les "records" tombaient, battus tantôt par lui, tantôt par moi.
Il en alla ainsi jusqu'en 1969.
Année où il hérita d'un superbe vélo de course 8 vitesses 2 plateaux.
Et là, la compétition devint inégale :(
Jean-Yves, avec son engin supersonique m'écrasait régulièrement. Et moi, sans jeu de mot, je rongeais mon frein.
Un jour de décembre 1969, alors que je roulais vers la grande surface récemment ouverte, un camion tourna à droite et me coupa la route. Je chutai lourdement, et m'en relevai ensanglanté. Je me souviens que la pharmacienne qui m'avait prodigué les premiers soins m'avait fait payer....
C'est à pied que je rentrai, clopinant, et poussant mon vélo. Je savais que si je ne le montais plus dans les jours qui suivaient jamais plus je n'en ferais.
Je savais aussi que si je remontais, je devrais alors affronter mon cousin avec son bolide dans des duels pas très égaux.
Je dois le dire, cette chute m'arrangeait de ce point de vue, je n'avais plus d'excuse pour éviter ces "tournois" injustes.
Et jamais, depuis, je ne suis remonté sur mon vélo....
Je vous embrasse.